Il y a cet escalier, un peu sombre, un peu mystérieux, parfois un peu inquiétant si mon cœur est en berne… Il va loin, quand je commence à le descendre, souvent je n’en distingue pas la fin. Parfois j’ai un peu le vertige, je ne suis pas très assurée, alors je m’assois en haut en espérant capter un peu de la chaleur d’en bas… Je suis triste, quand je ne parviens pas à descendre…
En bas, il y a cette porte, elle est lourde, en bois brut, elle grince un peu, elle s’ouvre très doucement. Il est facile de ne faire que l’entrouvrir, voire de rester devant à regarder juste la lumière filtrer en dessous, assise sur les dernières marches. Des fois je reste un peu là, mes mains posées sur le bois lourd, à humer les bonnes odeurs, à laisser monter en moi le désir d’entrer, à préparer mon cœur à la rencontre.
A l’entrée on peut se faire tout petit dans l’encoignure, sans se faire voir, presque, il y a la place pour rester accroupi et regarder à l’intérieur sans y être encore vraiment. On en voit la lumière, on en sent la chaleur, on en entend la vie.
Et puis je peux m’approcher, décider d’habiter le lieu, accepter de venir sous le regard de Celui qui m’attend là – au plus profond de moi – là où Il a établi à jamais sa demeure… Il est à la fois toujours occupé, et toujours en attente. Comme s’Il préparait de toute éternité le repas pour ma venue. Il sait que je suis descendue, que j’arrive, que je viens Le retrouver. Des fois je reste là, debout, à le regarder faire. Souvent je m’assois par terre, dans un coin. Parfois je viens à sa table.
Toujours Il respecte ce avec quoi je viens – mon désir, ma joie, mes réticences, mes incertitudes. Et m’accueille avec joie, sa Joie, que ce soit d’un sourire discret tout en poursuivant sa tâche, qu’Il pose son ouvrage pour s’asseoir face à moi, qu’Il vienne me laver les pieds ou qu’Il me serre fort contre son Cœur immense…
Toujours, son regard est de paix et d’amour. Il m’attend, parfois depuis longtemps, mais jamais aucune ombre dans ses yeux, jamais le souffle d’un reproche, d’une amertume. Juste une Joie simple et profonde pour accueillir ma venue.
Il ne se dit pas toujours quelque chose – ce lieu-là est largement fait de silences, des silences pleins et amoureux, du désir qui se dit en un regard, du réconfort qui s’exprime d’un geste – du pardon demandé dans un sourire.
Il est un lieu de retrouvailles évidentes, lieu de sanctification de la rencontre simple et joyeuse, de la vie ensemble.
Lieu du langage du cœur dont Tu as tracé le vocabulaire silencieux, édicté la grammaire de tendresse.
Elle est fête de nos cœurs, mon Dieu, cette demeure. Ta demeure en moi. Je te rends grâce pour elle.
A.S.